Le Grand-Bornand
17 novembre 2025, 20 h 07 min

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Un peu d'histoire

Un sport à l’origine militaire

En 1924 à Chamonix, lors des premiers Jeux olympiques d’hiver, une démonstration de patrouille nordique fut organisée, mais, jusqu’à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, le biathlon reste un sport exclusivement militaire.

Une des activités les plus anciennes des hommes du Grand Nord…

Bien avant d’être un sport olympique qui passionne les foules, le biathlon est certainement une des activités les plus anciennes des hommes du Grand Nord… qui, pour chasser se déplaçaient à skis, un arc sur le dos. On retrouve même des traces de ces skieurs-archers dans la mythologie scandinave. Au fil des siècles, la pratique s’est développée, tant à des fins guerrières que pour la chasse.

Les premiers championnat du monde

En 1958, pourtant, les premiers championnats du monde sont organisés à Seefeld en Autriche. Régenté par l’IUPMB, la fédération internationale qui avait sous la coupe le pentathlon moderne et le biathlon, le biathlon entre au programme olympique en 1960 à Squaw Valley aux Etats-Unis. Au départ, les pays de l’Est et les nations scandinaves, dont les bataillons pratiquaient assidûment cet art difficile depuis longtemps, ont dominé les compétitions.
Au fil des années, d’autres pays s’y sont intéressés et, actuellement, l’échelle des valeurs s’est considérablement transformée.

Le biathlon évolue pour devenir une discipline de référence

Jusqu’en 1972, on utilisait l’arme de guerre, qui rendait la discipline contraignante et en limitait la pratique. L’apparition du 22 long rifle a été une première évolution importante. L’indépendance du biathlon sous la bannière de l’IBU (International Biathlon Union) en 1993 permit à la discipline de prendre un tournant important. De cette autonomie nouvelle est né un virage capital avec l’apparition de nouveaux formats de compétition qui passionnent le public et attirent de nombreux partenaires, notamment en audience. Le caractère spectaculaire des courses gonfle l’audience télé et attire, sur les principales épreuves de la coupe du monde, des milliers de spectateurs. À Ruhpolding, Oberhof, Anterselva ou Oslo, les biathlètes sont reconnus et adulés, stars d’un spectacle captivant. Le duel entre Raphaël Poirée et Ole Einar Björndalen, ce terrible mano à mano durant près de dix ans, a été un piment essentiel dans la saga du biathlon international.

AGENDA NON EXHAUSTIF DES GRANDES DATES QUI ONT MARQUÉ CETTE DISCIPLINE… ET LE GRAND-BORNAND

C’est l’époque des pionniers. Le temps où tout se construit. Pour les plus audacieux, le biathlon est le plus vieux « sport » de l’humanité, inspiré par les chasseurs de la préhistoire qui, se déplaçaient sur des morceaux de bois en quête de gibier.

Au départ, il est une pratique militaire, entraînement pour les soldats des bataillons de montagne, contraints de se battre dans des conditions.

Patrouille militaire. C’est ainsi qu’est appelée l’épreuve inscrite au programme des Jeux olympiques 1924 avant d’être un sport de démonstration jusqu’en 1948. Elle est disputée par équipes de quatre, qui s’élancent ensemble avec un passage au pas de tir pour chaque concurrent.

André Vandelle, Gabriel et Maurice Mandrillon et Georges Berthet remportent la médaille de bronze mais la discipline, pratiquée avec un lourd fusil de guerre, à la fois bruyante et dangereuse, peine à séduire.

Populaire dans les pays de l’Est, où le sport de haut niveau est soutenu efficacement par l’armée et en Scandinavie, il se structure dans les années 50 avec les premiers Championnats du monde en 1958 et, deux années plus tard, l’entrée au programme olympique à Squaw Valley.

La piste est longue et difficile pendant deux décennies pour les biathlètes de l’équipe de France, souvent des fondeurs « relégués » au biathlon qui ne doivent leur salut qu’au soutien de l’armée et des douanes.

Sans moyens, sans structure, contraints par la lourde de guerre qui entrave la logistique de l’entrainement, le biathlon français monte peu à peu les marches avec les premiers coups d’éclat de Daniel Claudon dans les années 70 puis l’avènement d’Yvon Mougel.

Yvon Mougel, solide Vosgien de la Bresse, a tout connu du biathlon français. Les années de galère, au fond de la classe, dernier de ses premiers championnats du monde juniors en 1972. La lente progression, d’une marche à l’autre, avec les Sandona, Gruet Masson, Arpin, Claudon, pionniers d’une discipline qui avançait à tâtons. Le passage de l’arme de guerre à la 22 long rifle. Les premiers podiums de la Coupe du monde naissante en 1979 et la première médaille aux Championnats du monde en 1981 à Lahti en Finlande.

Une troisième place en sprint, à 4 secondes de la victoire, fédératrice pour le biathlon français qui savait désormais qu’il pouvait grimper sur les podiums.

Dirigée par David Moretti, un gaillard du Vercors qui a posé avec fermeté les bases de la rigueur et du sérieux pour l’équipe de France pendant une quinzaine d’années,

Yvon Mougel, porte drapeau de la délégation française aux Jeux olympiques 1984 à Sarajevo, encore une première pour le biathlon, passe tout près d’une médaille olympique dans le 20 kilomètres où il finit quatrième. Un index gelé, une balle manquée d’un rien et il échoue au pied du podium.  « J’ai posé les piliers du bâtiment », dit-il.

Le ski de compétition fait partie de l’ADN du Grand Bornand depuis le début du 20e siècle. La pratique du ski nordique de compétition, notamment le ski de fond, s’est développé dans les années 60, lorsque les disciplines nordiques sont sorties de l’anonymat grâce aux Jeux olympiques de Grenoble en 1968.

L’essor du biathlon en France, avec l’attribution des Jeux olympiques 1992 à Albertville, a contribué au développement dans les clubs et les stations des Alpes.

Le Grand Bornand obtient au début des années 90, l’organisation de manches de l’Alpen Cup, compétitions réunissant les meilleurs jeunes et les équipes B des principales nations, ancètre de l’IBU Cup, devenu l’antichambre de la Coupe du monde. C’est ainsi que la génération des Christophe Vassalo, le champion local, Patrice Bailly-Salins, Stéphane Bouthiaux, Gilles Marguet, Corinne Niogret ont pu disputer dans la Vallée du Bouchet leurs premières compétitions internationales sur les neiges françaises.

C’est l’histoire d’une équipe de France partie de pas grand chose qui déboule au sommet. Dans les années 1980, le biathlon féminin débute avec, en 1984 à Chamonix, le premier championnat du monde.

Les débuts sont chaotiques, sans trop de soutien fédéral sous le regard critique et narquois d’un univers très masculin.

Les pionnières y ont cru. Tenaces. Passionnées. En 1988, Marie-Pierre Baby monte sur le podium en Coupe du monde à Anterselva. Véronique Claudel se fait une place parmi l’élite, souvent seule femme au milieu de l’équipe de France masculine sur le circuit international « au point d’avoir été une fois oubliée à Minsk au moment de partir », se souvient-elle.

L’attribution des Jeux olympiques à la France en 1986 donna des moyens à leurs ambitions. Un groupe, confié à Francis Mougel, un pilier de l’équipe de France de la décennie, fut formé autour de Véronique Claudel et de quelques athlètes. Corinne Niogret, pas encore 20 ans, Anne Briand, fondeuse en rupture d’équipe de France, étudiante vétérinaire qui découvrit le biathlon pour dépanner les Bleues dans le relais des Universiades au fin fond de la Bulgarie, à Bansko, en 1989 progressent et découvrent les plaisirs de la course pour les podiums en individuel ou en relais.

Le 14 février 1992, sur le stade des Saisies, devant un public joyeux et enthousiaste, Corinne, Véronique et Anne additionnent trois performances hors normes et remportent le relais olympique, première dans l’histoire du biathlon. Triomphantes et heureuses d’avoir ouvert toutes grandes les portes pour celles qui depuis ont gagné aux quatre coins de la planète biathlon.

Jusqu’en 1993, le biathlon était géré par l’Union Internationale de Pentathlon Moderne et de Biathlon. Le mélange d’une discipline estivale et d’un sport d’hiver provoquait des lourdeurs qui freinait leur développement. Cette scission a permis au biathlon de se réinventer avec l’apparition progressive de nouveaux formats de course comme la poursuite ou la mass-start, plus animés, plus spectaculaires et plus simples à comprendre pour le grand public. Les Championnats d’Europe furent aussi créés et l’organisation de la première édition a été confié au Grand Bornand, récompensé pour son assiduité à organiser depuis les années 80.

Ce fut une réussite, couronnée par des résultats superbes de l’équipe de France qui avait dépêchée notamment ses championnes olympiques Anne Briand et Corinne Niogret.

Les Bleus ont terminé au sommet du tableau des médailles avec six unités dont une victoire de Corinne Niogret en sprint.

Mais on retiendra surtout la victoire en sprint d’un espoir de 21 ans : Raphaël Poirée, rejoint sur la seconde marche du podium par Gilles Marguet.

Double champion du monde juniors un an auparavant, le jeune Drômois avait mal digéré sa non-sélection pour les Championnats du monde seniors programmés quelques semaines après l’étape bornandine. Sa réponse fut ce succès, dans une belle euphorie collective, annonciatrice d’une superbe carrière et prémices de beaux instants de partage entre passionnés du biathlon sur le bord des pistes du Grand Bornand.

Sylvie Becaert est une enfant du Grand Bornand. Elle y a grandi, a appris le ski, les couleurs du Ski Club comme une seconde peau. Skieuse de fond, elle n’a pas gravi la dernière marche, celle des podiums en Coupe du monde et en 1997, elle a ajouté une carabine à sa panoplie de skieuse.

Sous la houlette de Pascal Etienne, entraîneur national, elle apprend, vite et bien, pour devenir notamment une des pièces maitresses du relais. 2003 a été sa saison la plus aboutie. « J’ai préparé la saison seule, en marge du groupe », j’avais compris ce que je devais faire », raconte-t-elle.

Toute la saison, elle joue aux avant-postes en Coupe du monde et empile les points au classement général.

En mars, les Championnats du monde ont lieu à Kanthy-Mansiisk au plus profond de la Sibérie et cloturent la saison. « J’avais glissé dans ma housse une paire de skis « cailloux ». Le genre de planches que tu utilises parfois en début de saison pour ne pas abimer tes meilleurs skis. Elle n’avait pas servi de l’hiver. C’est avec elle que j’ai couru le sprint. »

Sylvie déroule la course comme dans un rêve. Dans le final, elle rattrape la Bulgare Dafovska, leader de la Coupe du monde, partie trois dossards devant elle.

A 28 ans, Sylvie Becaert devient championne du monde du sprint et grignote les points qui lui permettent de remporter aussi le classement général de la Coupe du monde de la spécialité. Or + cristal : la saison parfaite.

Après la réussite de la saison 2003, Sylvie Becaert a vécu des moments difficiles et n’a jamais retrouvé le même niveau en individuel.

Souffrant du syndrome des loges, une infection survenant à l’effort dûe au gonflement d’un muscle trop sollicité, elle se bat, comme toujours, pour rester dans l’allure, malgré la douleur et reste un pilier du relais de l’équipe de France.

Le 23 février 2006, sur le site de San Sicario, à une portée de fusil de la France, Delphine Peretto, Florence Baverel, qui s’était imposée auparavant dans le sprint, Sylvie Becaert et Sandrine Bailly, au terme d’une course pleine de courage, remportent la médaille de bronze du relais des Jeux olympiques de Turin.

La veille, Roddy Darragon, médaillé d’argent en sprint en ski de fond, avait remporté la première médaille olympique de l’histoire du Ski Club du Grand Bornand.

Quatre ans plus tard, à Vancouver, juste avant de tirer sa révérence, Sylvie Becaert, cette fois associée à Marie-Laure Brunet, Marie Dorin et Sandrine Bailly, ajoutera l’argent à sa collection qui compte cinq  médailles mondiales dont deux en or et deux médailles olympiques.

8 000 personnes se sont massées dans la vallée du Bouchet le 1er avril 2007 pour les Championnats de France, traditionnel épilogue d’une saison de biathlon. La mass-start devient un événement car Raphaël Poirée, icône de la discipline, huit fois champion du monde, quatre fois vainqueur du classement général de la Coupe du monde et victorieux à 44 reprises dans sa carrière en Coupe du monde et Florence Baverel, championne olympique du sprint en 2006 à Turin, disputaient la dernière course de leur carrière.

Dans une ambiance joyeuse, les deux champions, motivés et appliqués, ont mis un point d’honneur à terminer par un ultime succès, avant de raccrocher définitivement la carabine.

Malgré les résultats étincelants de ses athlètes depuis les années 90, la France n’a pas organisé beaucoup d’événements d’envergure de biathlon durant cette période à l’exception des épreuves olympiques en 1992, des Championnats d’Europe au Grand Bornand en 1995 et d’un Championnat du monde juniors en 2004 en Haute Maurienne. La Fédération Française de Ski entend y remédier, consciente de l’impact d’une Coupe du monde pour le rayonnement de la discipline. Métabief, Bessans, Autrans, Chamonix et Le Grand-Bornand se portent candidats. Après une étude minutieuse des dossiers sur préconisation de l’IBU, Le Grand-Bornand est choisi le 24 novembre 2007. L’IBU valide la candidature française et la Fédération Française de Ski confie à Annecy-Le Grand-Bornand l’organisation d’une finale de l’IBU Cup en 2011 et de deux manches de coupe du monde en décembre 2013 et 2017.

L’IBU Cup est la deuxième division du biathlon international. Un circuit de haut niveau où se croisent les champions de demain et ceux qui, en recherche de performance, « redescendent » faire leurs gammes à l’échelon inférieur. Ce sont toujours des courses acharnées, où chaque balle, chaque seconde, peut peser sur une saison.

En mars 2011, le Grand Bornand, site de biathlon de la candidature olympique d’Annecy 2018, organise les finales de l’IBU Cup, répétition générale avant d’intégrer le calendrier de la Coupe du monde.  Sur le stade Sylvie Becaert, au cœur du village, les compétitions sont relevées et l’ambiance euphorique. De bon augure pour ce qui allait devenir le « GP de Monaco du biathlon ».

En 2011, Annecy obtient l’organisation des Jeux Mondiaux Militaires d’Hiver 2013. C’est un événement majeur pour le sport militaire avec un millier de participants de 40 pays. Pour les skieurs français, qui doivent tant à l’armée depuis des décennies, avec Martin Fourcade comme chef d’escadrille, les ambitions sont élevées.

Les épreuves de ski de fond et de biathlon  se déroulent dans la vallée du Bouchet. Face à une opposition de très haut niveau, les troupes tricolores remportent 12 médailles.

Du 12 au 15 décembre 2013, le Grand-Bornand organise sa toute première étape de la Coupe du monde de biathlon. Une première aussi pour une station française. Pas moins de 140 journalistes sont accrédités pour raconter les exploits des 200 biathlètes venus de 32 pays différents. Au total, près de 30 000 spectateurs se massent dans le stade Sylvie Becaert durant quatre jours et vibrent devant les premiers exploits d’un certain Johannes Boe. Encore junior, le Norvégien remporte les premières courses de sa carrière et vole la vedette à l’équipe de France emmenée par Martin Fourcade, alors double tenant du titre du gros globe de cristal.

Dans la foulée de la victoire de Justine Braisaz-Bouchet, Martin Fourcade l’imite et remporte à son tour la mass start dans un stade Sylvie Becaert incandescent. Après avoir trébuché une nouvelle fois sur Johannes Boe sur le sprint et la poursuite, le sextuple champion olympique prend sa revanche et se montre intouchable. Intenable sur la piste, il est irréprochable sur le pas de tirs, porté à par un 20/20 célébré d’un poing rageur. « C’est le plus gros souvenir de ma carrière en Coupe du monde car il y avait une énorme pression, une énorme attente, retient le septuple vainqueur du gros globe de cristal. Ce jour-là, j’ai été capable de l’emporter là où on m’attendait. » Devant les siens.

Le Grand-Bornand  prend  souvent l’accent norvégien et l’édition 2019 ne déroge pas à la règle. Emmenée par une armada guidée par ses leaders Johannes Boe et Tiril Eckhoff, la Norvège ne laisse que des miettes à la concurrence et réalise une semaine presque parfaite avec cinq succès sur six possibles. Victorieuse du sprint tout d’abord, puis de la poursuite, la biathlète de 29 ans vit une semaine de rêve dans la station haut-savoyarde en survolant également la mass start. Habitué à trôner sur la plus haute marche du podium, Boe poursuit sa moisson en remportant la poursuite et la mass start (ses cinquième et sixième succès en Haute-Savoie) et pose déjà ses premières phalanges sur un deuxième globe de cristal consécutif face à Martin Fourcade.

L’anomalie est enfin réparée. Alors que la Norvège avait fait du Grand-Bornand sa station de cœur, se plaisant à truster les podiums, la France prend une revanche éclatante en 2021. Portés par son duo de feu Quentin Fillon Maillet – Emilien Jacquelin caracolant en tête de la Coupe du monde, un an à peine après la retraite de son leader historique Martin Fourcade, les Bleus enchaînent les succès. Fillon Maillet s’impose sur la poursuite avant que Jacquelin l’imite le lendemain sur la mass start, lui chipant au passage le dossard jaune de leader. Julia Simon, deuxième de la poursuite et de la mass start, et Anaïs Bescond, troisième du sprint, offrent une fête totale aux 60 000 spectateurs ayant fait le déplacement durant 4 jours.

Dans un autre monde. Dans leur monde. La Norvège écrase la concurrence masculine lors de l’étape du Grand-Bornand en 2022. Les chiffres donnent le tournis : huit podiums sur neuf possible grâce notamment à son leader Johannes Boe, intouchable depuis le début de l’hiver, et son dauphin Sturla Holm Laegreid, sous le charme des Aravis. « C’est toujours particulier de courir ici. L’ambiance est unique, le public nous encourage. Parfois, on a l’impression d’évoluer à domicile tant on se sent soutenu », raconte-t-il dans la foulée de son succès sur la poursuite. Velkommen til Le Grand Bornand !

De l’émotion à tous les étages. Alors que Julia Simon, déjà deuxième de la poursuite la veille, et Anaïs Chevalier-Bouchet s’offrent une place sur le podium de la mass start, le public du stade Sylvie Becaert n’a d’yeux que pour l’enfant du pays. À 23 ans, Sophie Chauveau se fait un prénom à domicile. À l’image d’Antonin Guigonnat cinq ans plus tôt, la Bornandine enchaîne les accessits : quatrième du sprint pour son cinquième départ en Coupe du monde seulement, huitième de la poursuite et sixième de la mass start. « J’avais peur de me faire envahir et bouffer par le bruit, et puis finalement ça a été tout le contraire », avouera-t-elle dans la foulée de son entrée dans la cour des grandes.

Éric Perrot sur la deuxième marche, Émilien Jacquelin sur la troisième : chez les hommes, les Bleus savourent les miettes laissées sur la poursuite par l’ogre Johannes Boe, une nouvelle fois brillant au Grand-Bornand. Une revanche éclatante pour Perrot, deux ans après avoir pris de plein fouet la ferveur du public tricolore et traversé l’étape haut-savoyarde comme une ombre. Un retour au premier plan pour Jacquelin qui, après des mois de montagnes russes, retrouvait son instinct d’attaquant né, pour le plus grand bonheur des spectateurs. « J’aime courir pour la communion, relevait-il. Le public m’a donné de l’énergie. Ce partage rend ce podium très particulier. »

Figures du circuit mondial pendant près de quinze ans, Johannes et Tarjei Boe réussissent leurs adieux au Grand-Bornand. Quelques semaines avant leur retraite à 31 et 36 ans, les deux frangins norvégiens brillent en Haute-Savoie. Deuxième du sprint, Johannes Boe signe un énième récital sur la poursuite pour remporter le 88e de ses 91 succès en Coupe du monde. Le lendemain, son grand frère, vainqueur du gros globe en 2011, prend une éclatante revanche. Écarté sur le sprint et la poursuite, Tarjei Boe triomphe sur la mass-start et partage le podium en famille avec Johannes, troisième. La dernière danse d’un duo qui aura marqué de son empreinte le biathlon et le Grand-Bornand.

LES PERSONNAGES DU GRAND-BORNAND

CHRISTOPHE VASSALLO

Il est un personnage incontournable du paysage. Christophe Vassallo est un homme aux mille casquettes, toutes réunies sous la bannière d’une même passion : celle du biathlon. Biathlète à une époque où la discipline est loin de connaître la popularité actuelle, il raccroche la carabine mais reste sur le circuit. Rapidement, le Bornandin devient entraîneur, puis coordinateur national, se plaisant à transmettre l’art de son sport. En 2006, il prend la tête du bureau technique de la fédération internationale de biathlon (IBU). Le Haut-Savoyard devient alors l’architecte patient de la réforme des formats, plus court, plus spectaculaire. L’artisan de l’ombre d’un sport devenu désormais un spectacle planétaire.

SYLVIE BECAERT

Elle n’a jamais cherché la lumière mais son talent s’en est chargée pour elle. Sylvie Becaert, c’est l’histoire singulière d’une femme née à Lille en 1975 mais adoptée par les Aravis. Un destin avec des skis aux pieds et une carabine dans le dos qu’elle écrira en lettres d’or : championne du monde de sprint en 2003, puis du relais mixte six ans plus tard, la Bornandine ajoutera également deux médailles olympique et un petit globe de cristal à son immense palmarès. Alors comme une évidence, lorsqu’elle décide de prendre sa retraite en 2010, la station décide quelques mois plus tard de baptiser son stade international de son nom. « C’est un réel honneur, avoue-t-elle. Ma vie est ici. Encore aujourd’hui, voir la Coupe du monde, les athlètes – français notamment – performer sur mon site, c’est toujours une émotion particulière. »

SOPHIE CHAUVEAU

Elle est une enfant du Grand-Bornand. Une biathlète qui a fait ses gammes sous les couleurs du Ski Club local avant de se révéler au monde un après-midi de décembre 2022. Chez elle. Pour son cinquième départ seulement en Coupe du monde seulement. La Haut-Savoyarde tutoie le podium sur le sprint, portée par la clameur des siens. Sa semaine sera fabuleuse, enchaînant les accessits sur la poursuite et la mass start et prouvant qu’il faudra désormais compter sur elle. Depuis, la biathlète de 25 ans poursuit son chemin, fort de deux podiums en Coupe du monde.

BENJAMIN DAVIET

L’anecdote reflète à merveille le personnage. En janvier 2021, au moment de choisir son porte-drapeau pour les Jeux de Pékin, les athlètes du mouvement paralympique couchent un nom et un seul : celui de Benjamin Daviet. Le Bornandin est plus qu’un membre de l’équipe de France, il en est le grand frère. Triple champion paralympique à PyeongChang en ski de fond et biathlon, le Haut-Savoyard ajoutera deux nouvelles médailles d’or aux Jeux de 2022, complétant un impressionnant palmarès, riche également de neuf titres mondiaux et de 37 victoires en Coupe du monde. Toujours en quête de nouveaux défis, celui qui a vu son destin basculer lors d’un accident de mobylette lorsqu’il avait 17 ans rêvait de participer aux Jeux Paralympiques d’été 2024. Mission accomplie : Daviet termine 5e de la finale d’aviron à Paris.